N’avez-vous jamais remarqué que certains sports, loin d’être démocratisés, sont ceux d’une certaine élite ? Ceci s’explique simplement par leurs origines féodales, à l’époque où la noblesse (princes, seigneurs ou chevaliers) représentait la partie de la population amenée à combattre en cas de conflit.
On peut aisément identifier les sports actuels qui en sont directement inspirés : l’équitation ou le polo peuvent être assimilés à la cavalerie, l’escrime à l’infanterie, la voile à la marine… Nous évoquerons toutes ces disciplines, en nous attardant au final sur un cas particulier : celui du golf.
Sports équestres
Le cheval à l’honneur
Le domaine de l’équitation tend à se démocratiser : en effet, peu d’enfants ne sont, de nos jours, jamais montés sur le dos du cheval ou d’un poney, tant les activités de ce type se sont multipliées dans les parcs d’attraction ou de loisirs.
En revanche, sa pratique régulière demeure réservée aux plus aisés, généralement propriétaires d’un destrier. Le prix d’un cheval de loisirs s’élève à quelques milliers d’euros (en ce qui concerne les chevaux de compétition, le ciel est la limite : certains pur-sang dépassent nettement le million d’euros) et l’on doit ajouter la location du box, du pré, les soins, le ferrage, l’équipement…
A propos d’équipement, certaines marques de luxe proposent des articles hippiques, ce qui révèle aujourd’hui encore un certain élitisme de cette discipline. En guise d’exemple, on peut citer la fameuse marque de luxe Hermès, qui était à l’origine une manufacture de harnais et d’équipements pour chevaux. Le matériel d’équitation proposé par Hermès est aujourd’hui encore unanimement reconnu pour sa qualité irréprochable, avec une gamme de selles (réalisées sur mesure pour le cheval) disponible pour chaque discipline équestre : obstacles, cross, dressage…
Polo
Le polo, sport équestre opposant 2 équipes de 4 joueurs, est depuis ses origines reconnu comme « le jeu des rois » : sous l’Antiquité, c’était un sport intensément pratiqué par les nobles perses. Au fil des siècles, il gagna en notoriété dans le monde entier et devint même sport olympique de 1900 à 1936, sans pour autant devenir un divertissement populaire (il est en effet plus facile d’organiser un match de foot ou de basket entre amis plutôt qu’une rencontre de polo).
A l’exception notable de l’Argentine qui domine sans conteste au niveau mondial, et où les matchs se déroulent devant des dizaines de milliers de spectateurs dans les plus grands stades du pays, le polo demeure réservé aux élites : les membres de la famille royale d’Angleterre, par exemple, participent régulièrement à des tournois de polo caritatifs organisés par des Country Club prestigieux. La discipline est également présente dans les stations de sport d’hiver haut de gamme : le Polo Masters Tour se déroule en 3 étapes à Val d’Isère, Megève et Courchevel.
La marque de mode Polo Ralph Lauren, devenue célèbre pour ses vêtements du même nom, arbore d’ailleurs en guise de logo un joueur brandissant son maillet.
Compétition automobile
Certains d’entre vous seront étonnés de voir intégrer cette dimension mécanique ici. Pourtant, le sport automobile s’inscrit clairement dès ses origines dans la tradition de l’homme conduit par sa monture ; les moteurs modernes ne font que remplacer les traditionnels équidés. On remarque d’ailleurs que l’unité de « cheval-vapeur » permettait de comparer la puissance des premiers véhicules avec celle de l’animal, et qu’aujourd’hui encore de nombreuses personnes font référence à la puissance de leur moteur en terme de chevaux.
Les courses automobiles sont réservées aujourd’hui encore à une cible privilégiée : si les pilotes les plus célèbres (Schumacher, Alonso, Vettel…) font partie des sportifs les mieux rémunérés au monde, aux échelons inférieurs, bien souvent, il faut débourser de l’argent pour obtenir sa place sur le circuit. Cette pratique existe encore de nos jours, même si elle tend à se raréfier en Formule 1 : un champion comme Niki Lauda a effectué ses débuts par ce biais, et certains comme Pedro Diniz déboursent plusieurs millions d’euros chaque année pour avoir leur place dans un baquet. En 2013, le Français Charles Pic a réussi à se frayer une place parmi les champions de F1, principalement grâce au groupe Lagardère qui le sponsorise et apporte environ 6 millions d’euros par an à l’écurie Caterham.
Dans cet univers de moteurs vrombissants où l’argent a une place prédominante, il n’est guère étonnant de voir figurer des marques de luxe en guise de sponsors. On remarquera par exemple que le chronomètre officiel de la Formule 1 et de l’Automobile Club de France (l’un des plus prestigieux clubs privés) n’est autre que Rolex.
Au niveau amateur, le luxe est également omniprésent ; les gentlemen drivers se réunissent en associations et clubs pour piloter leurs bolides hors de prix. Sur la piste, les Alfa Romeo Spider, Dodge Viper ou autres Lamborghini Murcielago font admirer leurs lignes élégantes.
Escrime : des duels aux JO
Les premiers maîtres d’armes firent leur apparition en France aux alentours du XIIIe siècle. Au cours du Moyen-Age, le maniement de l’arme blanche (épée, masse, dague, poignard…) devint un enseignement indispensable pour la noblesse. L’apparition de la rapière au XVème siècle va profondément modifié les codes de cette discipline : cette épée longue et fine, destinée principalement à l’estoc (coup porté avec la point de l’arme et non la lame), va permettre le développement d’une escrime de loisir, avec l’organisation de concours et de compétitions.
La mode du duel causa un nombre très important de morts parmi les gentilshommes à partir du XVIème siècle : les aristocrates étaient en effet prêts à inventer n’importe quel prétexte fallacieux pour combattre, et il fallut attendre la codification de cette pratique après la Révolution Française pour la voir s’atténuer quelque peu.
Ce sport d’élite va mettre longtemps à s’ouvrir au monde : France, Italie et Allemagne trustent pendant de nombreuses années l’essentiel des podiums de la discipline (qui, même en France, demeure confidentielle en dehors des périodes de Jeux Olympiques). A partir de la Deuxième Guerre Mondiale, l’escrime commence à devenir populaire en Europe de l’Est. Depuis, certains escrimeurs coréens, chinois ou cubains ont connu quelques succès, mais la discipline reste dominée par les Européens.
Le matériel demeure relativement onéreux et uniquement disponible chez des équipementiers spécialisés, comme les marques françaises Cartel ou Prieur. Si l’arme (épée, sabre ou fleuret) reste relativement abordable (autour de 100 euros en moyenne), certains équipements comme le masque à visière transparente, peuvent largement dépasser ce seuil. Les équipementiers « classiques » comme Nike ou Adidas se cantonnent à la fabrication et la vente de chaussures spécialement adaptées à la discipline.
Univers marin
Quand on évoque le terme de yacht , on pense immédiatement aux énormes navires de luxe qui s’alignent dans le port de Saint-Tropez. Or, à l’origine (autour du XVIIème siècle), ce terme désignait des voiliers de taille réduite destinés à la navigation de loisirs. Dès cette époque, des régates (courses de voiliers disputées sur un parcours fermé) sont organisés par l’aristocratie anglaise. L’engouement pour le yachting va atteindre son apogée au cours du XIXème siècle, particulièrement au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, au sein de la haute bourgeoisie.
Depuis, cette discipline est associée à l’univers du luxe et des élites : ce n’est pas un hasard si l’une des plus prestigieuses compétitions du monde de la voile est nommée la Coupe Louis Vuitton, du nom de la célèbre maison de maroquinerie, qui créa cette Coupe dont le vainqueur remporte le droit de défier le tenant du titre de la Coupe de l’America.
Mais outre les régates, d’autres catégories de courses existent : on pense notamment aux courses-croisières, au cours desquelles les équipages doivent parcourir un tracé reliant un point à un autre. Parmi les plus célèbres, les différentes Transat qui, comme leur nom l’indique, relient 2 villes de part et d’autre de l’Atlantique (comme la Transat Québec - Saint-Malo). C’est dans ce type de compétitions que s’affrontent des monocoques et multicoques aux dimensions et vitesses impressionnantes, véritables Formule 1 de l’Océan.
D’autres modèles privilégient le luxe et la grandiloquence : comment ne pas évoquer le Douce France, véritable joyau de 42 mètres de long, entièrement fabriqué par les membres du chantier Alu Marine en Loire-Atlantique. 2 ans auront été nécessaires pour construire ce palace flottant : les images parlent d’elles-mêmes.
Golf, un cas particulier
Un peu d’histoire
Si les origines exactes du golf demeurent mystérieuses, on sait en revanche que le jeu fit fureur en Ecosse dès le XVème siècle. Il fut même interdit par décret du roi Jacques II, car les archers royaux passaient trop de temps à jouer et négligeaient leur entraînement guerrier ! Cependant, ses successeurs autorisèrent à nouveau la pratique de sport et lorsque Jacques VI d’Ecosse fut proclamé Roi d’Angleterre, l’aristocratie britannique toute entière fut saisie par le démon de ce jeu.
Par la suite, ce sont les francs-maçons qui vont contribuer au développement de ce sport : en effet, les loges maçonniques furent à l’origine de la création des premiers Clubs consacrés à la pratique du golf. Depuis, ce sport discipline est associée à cette organisation recrutant ses membres par cooptation, et qui ainsi à contribuer à faire du golf un divertissement « élitiste ».
Une démocratisaton lente, mais réelle
Le golf reste à l’heure actuelle toujours associé aux notions de haute bourgeoisie et de luxe : il fait partie intégrante des Country Club les plus réputés et reste cher à pratiquer. A titre indicatif, la plupart des joueurs utilisent 14 clubs pour disputer une partie (maximum autorisé), et le prix d’un seul club peut facilement dépasser les 500 euros. Il faut ajouter à cela l’inscription pour pouvoir jouer sur le parcours (environ 2000 € par an, variable selon les golfs), le reste de l’équipement…
Le prestige lié à ce sport explique que les meilleurs golfeurs figurent régulièrement parmi les sportifs les mieux payés, Tiger Woods en tête. Une part très importante de leurs revenus provient des contrats publicitaires, avec évidemment des équipementiers sportifs comme Nike ou Adidas, mais également des marques de luxe. Rolex, par exemple, a signé avec Tiger Woods, profitant du contrat rompu par Tag Heuer suite aux scandales entourant le divorce du sportif. La célèbre marque suisse est également présente sur le circuit féminin, le classement des meilleures joueuses mondiales s’intitule d’ailleurs, en toute discrétion, le… Rolex Rankings !
Même si le golf est toujours considéré comme un « sport de riches », sa popularité va grandissante en France : de nombreuses écoles primaires et collèges proposent cette activité sportive à leurs élèves. L’option golf est également disponible au baccalauréat ! Si tous ne fréquenteront pas les clubs à l’avenir, ils auront toutefois pu glaner de précieux points pour obtenir leur diplôme…
Well, permettez moi de vous signaler que vous avez forget, pardon, oublié (thanks google translate), le Cricket. Certes démocratised, ce sport est toujours a posh sport.
Bonjour Roger,
Well, nous avons hésité lors de la rédaction de l’article à consacrer un paragraphe au cricket. Mais à la réflexion, il nous a plutôt semblé qu’il s’agit seulement d’un sport rare en Europe mais très populaire ailleurs (en Inde, et de manière générale dans les anciennes colonies britanniques). Au même titre que d’autres comme le baseball, nous l’avons donc volontairement mis de côté.
Thanks a lot for your comment.