Que vous soyez amateur, expert ou investisseur, vous constituer une cave de grands vins de Bordeaux est le fruit d’une passion, d’une patience, voire un passage obligé. Avec leur potentiel de garde, les grandes cuvées bordelaises demeurent des valeurs sûres, plus recherchées et moins spéculatives que les meilleures de Bourgogne (parfois pourtant plus chères). Voici les grands noms qui rempliront, si ce n’est pas encore le cas, votre cave.
Cette sélection s’appuie notamment sur les 2 classements officiels des vins de Bordeaux :
- celui de 1855 demandé par Napoléon III et devenu une référence
- celui de Liv-Ex (London International Vinther Exchange), bourse en ligne des vins qui se base plutôt sur les cours
Quant aux millésimes que nous recommandons, ils reposent sur les notations de Robert Parker ainsi que Bettane et Dessauve (B&D), oenologues de renommée mondiale dont les critiques sont décisives dans l’établissement de la cote des vins.
Remarque générale : L’engouement des investisseurs est tel depuis quelques années qu’il pourra s’avérer difficile de vous procurer certains millésimes, voire certains châteaux mentionnés. De même, les cuvées des plus grands noms sont bien souvent vendues à l’avance. Celle de l’année en cours aura ainsi la plupart du temps d’ores et déjà ses acquéreurs, et vous devrez dès à présent songer à réserver pour la prochaine et dans certains cas la suivante…
- Les Grands Crus prestigieux
- - Les Rouges
- - Les Blancs
- Les indispensables en 6 appellations
- - Les meilleurs Margaux
- - Pour les amateurs de Pauillac
- - Les Pomerols de légende
- - Le Cheval Blanc Saint-Emilion
- - Le Saint-Estèphe incontournable
- - Le Sauternes sans ouvrir un Yquem
- Quelques bonnes adresses
- - Points de vente de vin de prestige
- - Achat de Grands Crus en ligne
Les Grands Crus prestigieux
Les Rouges
Château Lafite Rothschild (appellation : Pauillac). Il s’agit du nom le plus recherché au monde. 1921, 1945, 1982, 2000 et 2005 comptent parmi les millésimes exceptionnels, mais difficiles à se procurer et à partir de 1 000€ la bouteille. Le 2005 est encore accessible sans grande difficulté et promet l’excellence, noté 96/100 par Parker et 19/20 par B&D. Les années plus récentes restent elles d’autant plus incertaines que la dégustation et le verdict des experts doivent attendre le vieillissement de 10 ans minimum. Dans vos rêves les plus fous, peut-être parviendrez-vous à posséder l’une des rares bouteilles du cru 1789 (plus de 150 000€).
Notes arômatiques typiques : amande et violette.
Château Latour (Pauillac). 1945, 1959, 1961, 1982, 1990, 1996, 2000, 2003 et 2005 restent à ce jour les meilleures années, avec cependant une réserve
sur les dernières. En effet, 10 à 20 années de conservation en bouteille sont un minimum pour que se résorbent ses puissants tannins et que se révèle pleinement sa profondeur. Mais en acquérant les millésimes récents, l’amateur comme l’investisseur miseront sur l’exceptionnelle régularité de ses crus.
Arômes : gros fruits rouges, réglisse, notes finales taniques. Prix moyen autour de 4 500€ la bouteille.
Château Mouton Rothschild (Pauillac) : Comme les autres, 1945 reste une année mythique (plus de 8 000€ la bouteille). On évitera les crus des années 70 et 80 (sauf 1982), très irréguliers et loin d’atteindre l’authentique excellence du château. Mieux vaut miser sur certaines années récentes qui s’avèrent exceptionnelles, d’ores et déjà notées 96/100 et plus par Parker : 2000, 2005, 2006, 2010. 2008 est également une année prometteuse, mais avec un degré de certitude moindre : atteindra-t-elle la complexité aromatique propre aux meilleures années ?
A noter que depuis 1945, l’étiquette de chaque cru diffère, généralement réalisée par un artiste reconnu (Miro, Picasso, Chagall…) : avis aux collectionneurs…
Arômes : cassis très marqué, notes finales subtiles de tabac.
Château Margaux (Margaux). Les meilleures années, notées 99 par Robert Parker, restent clairement 1996, 2003, 2009, 2010. 2005, notée à peine moins (98), en vaut également la peine, tout comme 2000. Quant aux millésimes de légende, il s’agit de 1900, 1928, 1937, 1945 et surtout 1961, dont on a pu dire qu’il est « bâti pour l’éternité » tant sa garde est excellente. Pour les plus passionnés, sachez qu’il existe encore quelques très rares bouteilles de 1870 (autour de 20 000€ l’unité).
Un peu moins complexe, le second vin du Château nommé Pavillon Rouge mérite l’attention de l’amateur averti, qui devra compter autour de 2 000€ la caisse de 6 bouteilles. Les meilleures années sont les mêmes que le premier vin, la différence étant principalement liée au fait que les raisins sont issus de pieds de vignes plus jeunes, n’ayant donc pas encore la parfaite maturité.
Arômes : fruits noirs, réglisse ; tannins particulièrement doux.
Château Haut-Brion (Graves jusqu’en 1986, désormais Pessac-Léognan). Les cuvées incontournables sont celles de 1926, 1928, 1945, 1955, 1959, 1961, 1986, 1989, 1998, 2000. Quant aux plus récentes, 2006, 2007, 2009, 2010 (notée 100 par Parker), 2012 demeurent exceptionnelles, avec un potentiel de garde de plusieurs dizaines d’années (vendues plusieurs milliers d’euros l’unité). A l’inverse, évitez les cuvées des années 70 si vous comptez faire vieillir très longuement vos bouteilles. Vinatis propose le millésime 2011 à près de 400 €.
Par rapport aux autres premiers crus, il se distingue par ses tannins soyeux et ses arômes empyreumatiques plus soutenus : cuir, havane…
Château La Mission Haut-Brion (Pessac-Léognan). A partir de 1971, presque chaque année est un excellent millésime, les plus notables étant celui de 1990 (noté 99 par Parker) et surtout celui de 2000 (noté 100). Pour des cuvées antérieures, la plus mythique reste celle de 1955 (environ 2 000€ la bouteille).
Arômes : fruits rouges, réglisse, épices, parfois truffe.
Les Blancs
Un seul vin blanc très prestigieux de Bordeaux figure au classement de 1855 : le célèbre Château d’Yquem, ce Sauternes d’exception considéré comme le meilleur vin liquoreux au monde. Les grands millésimes sont rares et les prix des plus anciens dépassent les 40 000€ : 1784, 1825, 1847, 1865, 1870, 1893, 1904, 1921, 1937, 1947, 1949, 1967, 1983, 1986, 1988, 1990, 1997, 2001, 2005 et 2010. Les autres années offriront certes un excellent Sauternes, mais n’auront pas toute l’ampleur, toute la puissance et la subtilité de l’arôme de safran et d’encens des crus d’exception. Notez qu’il faut attendre au minimum 15 ans pour déguster une bouteille à son apogée.
Quant à certaines années, elles n’ont tout simplement pas été commercialisées faute d’être jugées suffisamment à la hauteur, par exemple celles se terminant en 2. Ainsi, ne croyez pas faire un excellent investissement si l’on vous promet pour quelques centaines d’euros une caisse de l’année 2012 devant soi-disant valoir une fortune dans 20 ans ! 1952, 1972, 1992 sont dans le même cas, ainsi que 1910, 1915, 1930, 1951, 1964 et 1974…
Les indispensables en 6 appellations
Une belle cave ne saurait se composer uniquement de Château Latour ou Haut-Brion. Outre ces noms d’exception en tête du classement 1885 et Liv-Ex, vous devez vous procurer un assortiment des autres meilleurs crus bordelais, dont certains comme le Cheval Blanc ou le Pétrus ont au moins autant de prestige. Voici une sélection classée en fonction des appellations.
Les meilleurs Margaux
Outre le célèbre Château Margaux, voici les seconds crus du classement de 1855 :
- Château Brane-Cantenac
- Château Durfort-Vivens
- Château Lascombes
- Château Rauzan-Ségla
- Château Rauzan-Gassies
Tous méritent naturellement l’attention de l’amateur ou de l’investisseur. Si vous ne deviez en retenir qu’un ou deux, optez plutôt pour une grande année d’un tannique Château Lascombes ou d’un Château Rauzan-Sléga aux notes de violette (qui pour anecdote appartient à la maison Chanel) : ils s’accorderont parfaitement avec un repas gastronomique d’exception.
Vous pouvez éventuellement vous essayer à un 3ème cru comme par exemple le Château Palmer, réputé pour son élégance. L’année 2010 a été notée 98/100 par Robert Parker : il vaut très certainement la peine d’attendre qu’il vieillisse encore une petite dizaine d’années avant de le déguster… ou de le revendre.
Pour les amateurs de Pauillac
Si vous souhaitez tester un second cru Pauillac, vous n’avez le choix qu’entre 2 :
- Château Pichon-Longueville
- Château Pichon-Longueville Comtesse de Lalande
Comme pour les autres Pauillac, favorisez 2000, 2005 et 2010 si vous comptez les faire vieillir ou investir, ou 1978 et 1982 pour déguster lors d’une grande occasion.
Quant aux 3ème crus, il n’en n’existe pas, et seul le Château Duhart-Milon représente les Pauillac parmi les 4èmes.
Les Pomerols de légende
Comment prétendre se constituer une cave d’exception qui ne comporte pas un ou plusieurs Pétrus ? Les grandes années de ce Pomerol mythique sont 1929, 1945, 1946, 1947, 1961, 1962, 1982, 1989, 1990, 2000 et 2005. Le prix d’entrée d’une bouteille au « petit » millésime est de 600€, mais la moyenne se situe plutôt autour de 3 000€ et plus de 15 000€ pour un cru d’exception comme 1962. Notez d’ailleurs que Pétrus reste tout simplement en moyenne le vin de Bordeaux le plus cher.
D’autres Pomerol figurent parmi les vins bordelais qu’il faut au minimum avoir goûté une fois. Château Le Pin constitue une cuvée confidentielle (à peine plus de 2 hectares seulement de vignes) extrêmement prisée par les collectionneurs et les amoureux du vin. Aussi vous faudra-t-il compter au moins 1 500€ la bouteille. Les grandes années sont sensiblement les mêmes que celles de Pétrus, dont le domaine est voisin. Détail intéressant, une puce électronique est désormais intégrée au bouchon de chaque bouteille pour vérifier l’authenticité et lutter contre la contrefaçon.
Château Lafleur se distingue par un assemblage de merlot et de cabernet franc original pour un Pomerol, avec des millésimes 2009 et 2010 qui promettent une garde d’au moins 40 ou 50 ans. Notés 100 par Parker, les millésimes d’exception sont 1947 (environ 12 000€ la bouteille) et 1982 (environ 6 000€).
Le Cheval Blanc Saint-Emilion
Le Château Cheval Blanc reste un incontournable des vins de Saint-Emilion. Dans le classement 2012 des vins de ces derniers, il figure parmi les Premiers Grands Crus Classés A aux côtés de Château Angélus, Château d’Ausone et Château Pavie. A la limite de Pomerol, il se distingue parmi les Saint-Emilion par son assemblage 60% de cabernet franc et 40% de merlot ; et l’on dit qu’il se distingue en réalité d’absolument tout autre vin. 1900, 1920, 1921, 1929, 1947, 1948, 1949, 1953, 1959 et 1961 restent les millésimes les plus rares, nécessitant après des recherches acharnées plusieurs milliers voire dizaines de milliers d’euros pour se les offrir. 1967, 1982, 1990, 1998, 2000 et 2005 sont les plus grands millésimes en termes de qualité. Il est encore possible de se procurer les deux derniers pour moins de 1 000€ la bouteille.
Quant aux autres châteaux cités précédemment, ne vous en privez évidemment pas (un Château Pavie 2010 noté 98/100 par Parker a un potentiel incontestable à tous points de vue)…
Le Saint-Estèphe incontournable
Château Cos d’Estournel, Saint-Estèphe voisin du domaine Château Lafite Rotschild, offre un vin du Médoc typique d’une qualité exemplaire. La réputation de ses notes particulièrement épicées et de sa longueur en bouche vous feront sans doute entendre dire de la part des passionnés qu’il s’agit du premier des Saint-Estèphe. Autre deuxième cru du classement 1855, Château Montrose (propriété de Martin Bouygues) offre également de très beaux millésimes, comme le 2000, le 2005, le 2010 et surtout le 2009 (Robert Parker le note 100).
Le Sauternes sans ouvrir un Yquem
En tête des Premiers Crus de Sauternes dans la classification de 1855, Château La Tour Blanche séduira les amateurs de grand vins liquoreux. Certes bien moins prestigieux que l’Yquem, certaines années pourraient peut-être s’en approcher comme 1947 et 1982. Il faut cependant noter une double tendance du château depuis les années 2000 : des Sauternes à la fois plus raffinés, mais aussi plus accessibles aux non-initiés et qu’il est possible de déguster plus tôt. Si vous pensez qu’elle s’accorde avec un esprit durable de notre époque, vous pouvez tenter votre chance en investissant dans quelques caisses avant que les prix ne s’envolent.
Château Climens propose lui aussi des crus d’exception, notamment la cuvée 2001 notée 100 par Parker.
Vous pouvez aussi opter pour l’alternative du Barsac, l’autre appellation du vignoble sauternais. Château Caillou, par exemple, conviendra à ceux appréciant particulièrement les Sauternes aux notes de fruits exotiques et d’agrumes.
Quelques bonnes adresses
Points de vente de vin de prestige
Une manière simple de se procurer un grand vin reste de se rendre au château même à l’occasion d’une visite de cave, par exemple à Château Latour. Malheureusement, certaines propriétés sont fermées au public et vous devrez passer par un négociant ou un caviste. Dans les caves de chez Fauchon ou Hédiard Place de la Madeleine, par exemple, vous trouverez certains seconds crus et parfois quelques bouteilles d’exception.
Cependant, il reste préférable de se rendre dans un point de vente spécialisé, à plus forte raison si vous ne connaissez pas très bien les meilleurs millésimes. A Paris, vous pouvez aller notamment chez :
- Lavinia au 3 boulevard de la Madeleine
- Caves Augé au 116 boulevard Haussmann
- Caves Legrand au 1 rue de la Banque
Par ailleurs, n’hésitez pas à vous tenir au courant des ventes aux enchères chez Christie’s ou Sotheby’s : c’est généralement au cours de celles-ci que vous pourrez acquérir les crus les plus rares.
Enfin, si vous souhaitez seulement déguster un très grand vin autour d’un repas exceptionnel, sachez que c’est le restaurant La Tour d’Argent qui possède la cave la plus prestigieuse de Paris. Le Taillevent sera également un bon choix, d’autant que sa cave est ouverte au public.
Achat de Grands Crus en ligne
Contrairement à ce que l’on pense, il n’est pas nécessaire de se déplacer en salle d’enchères ou dans les châteaux pour se procurer des crus de ce type. Il existe un certain nombre de sites web où vous pourrez trouver des bouteilles de grande valeur, parmi lesquels :
- Lavinia.fr, la référence malgré une politique tarifaire jugée parfois élevée
- Cavissima, un site permettant de se constituer sa cave à vin pour découvrir ou investir et proposant à la vente à peu près tous les noms évoqués ci-dessus.
- Vin Malin.fr, où certaines très bonnes affaires se présentent de temps à autres.
- Millésima, un spécialiste des grands vins, notamment en conditionnement optimal de vieillissement, à savoir le magnum.
- IdealWine.com, une plateforme d’enchères en ligne spécialement consacrée au vin où vous pourrez parfois trouver une bonne année d’un second cru comme Château Lascombes.
1855, aujourd’hui liquidé, a longtemps été le site incontournable de vente en ligne de vin. Malgré une réputation sulfureuse liée à des problèmes logistiques, les professionnels lui accordaient leur confiance à cause du soin apporté au stockage, au conditionnement et aux conditions de transport (vin maintenu en permanence à la température et dans les conditions d’humidité idéales, bonne protection des bouteilles…). Aujourd’hui, tous les spécialistes s’inspirent de leurs méthodes.
Dans tous les cas, n’hésitez pas à comparer les prix d’un site à l’autre pour une même bouteille, ainsi qu’à vous renseigner sur les conditions de stockage et de livraison. Ce dernier point reste peut-être plus important qu’un bon prix. Un e-caviste peu sérieux pourra certes sembler vous proposer une bonne affaire ; mais si ses caisses de Château Margaux sont stockées l’été dans un entrepôt à l’intérieur duquel il ne fait pas moins de 20°, votre achat sera purement et simplement un gâchis…
Se faire une belle cave chez Lavinia est un peu utopique. Ils sont snobs et gardent leurs vins comme des peintures classiques. J’irai faire un tour chez Auge et Legrand, que je ne connaissais pas.
1/ 1855 est en depot de bilan
2/ caves auge et lavinia font parti du meme groupe et honnetement je prefere le patron de lavinia que celui d’augé
Et caves augé ont refusé plusieurs fois de me vendre certaines bouteilles cachées mais sur le catalogue
Lavinia, toute les bouteilles sont exposées et tout le monde peut acheter. Par contre les prix sont un peu allumés.
Je suis plutôt amateur de Bourgogne mais c’est un plaisir à lire. Par contre en ce qui concerne les arômes, je ne suis pas tout à fait d’accord cela dépend du millésime.